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La culture pour tous... Oui mais !

Editorial (n°19 – Avril 2014)
écrit par Akli Amrouche

Le secteur de la culture est le seul, aujourd’hui, à disposer non pas d’un, mais de deux schémas nationaux. L’un concerne le développement des infrastructures culturelles à travers le territoire national : musées, bibliothèques, théâtres, cinémas, etc., l’autre représente un schéma directeur pour la préservation et la mise en valeur du patrimoine culturel. Cela nous donne un maillage d’infrastructures et de lieux culturels d’une extrême richesse. Le problème est que l’Algérie d’aujourd’hui, profitant d’une aisance financière jamais connue par le passé, multiplie les programmes d’investissements publics dans tous les secteurs : stades, hôpitaux, universités, écoles, tourisme, industrie, énergie, logements, transport, routes, etc. Une ambition démesurée qui fait naître des couacs visibles à chaque fois que l’on se penche sur un secteur donné.
L’ensemble des gestionnaires avec qui nous avons eu l’occasion de nous entretenir s’accordent sur les difficultés de mise en œuvre des programmes lancés : Absence de compétences managériales, nombre insuffisant d’entreprises qualifiées, difficultés d’obtention des autorisations de programme, manque de coordination entre les secteurs, etc. Partant de ces constats, il serait judicieux de se pencher sur les vrais problèmes que connaît présentement notre pays.

Au sein de notre collectif, nous pensons qu’il est important de revoir notre système de gouvernance qui a prouvé ses limites. Plusieurs exemples peuvent être concrètement donnés pour témoigner des lourdeurs dont sont victimes les ambitions affichées : Le ministère de la Culture, puisque c’est notre focus pour cette édition, a pour projet d’implanter 1541 bibliothèques communales, un projet capital et méritant. Toutefois, les autorisations de programme sont obtenues au compte-gouttes : il faut une parcelle de terrain, un budget conséquent, une procédure de marché public (…) Tout cela fait perdre beaucoup de temps ! Pourtant, il est possible de travailler en équipe, en associant le ministère de l’Habitat qui construit à lui seul deux millions de logements avec des projets dans chaque commune, réserver par exemple, un niveau ou deux d’un immeuble de logements pour y installer une bibliothèque. Ce programme étant parfaitement compatible, la commande d’architecture pour ce genre d’immeuble ne sera que bénéfique à la réflexion des architectes qui produiront des quartiers mieux lotis et mieux intégrés. Ainsi nous résolvons le problème en un temps record au vu des énormes programmes d’habitat. Beaucoup d’exemples de ce type peuvent être donnés.

En encourageant la mutualisation des dépenses publiques, notre pays peut se développer très rapidement tout en faisant de grandes économies. Dans cette perspective, une réflexion devrait être sérieusement menée pour l’intégration de dispositifs flexibles permettant des actions transversales concertées, vigoureuses et dynamiques. Cela doit d’abord commencer aux échelles inférieures, au niveau des quartiers, des communes : petites salles de cinéma, projets de locaux commerciaux, dispensaires, commissariats et mairies de quartier, bureaux de poste et télécommunications, infrastructures sportives de proximité, régies de quartier, etc. L’intégration de ces petites infrastructures changera certainement le climat socioéconomique très tendu dans nos cités dortoirs.

Gouverner c’est apporter du bonheur aux citoyens et ce bonheur ne vaut que s’il est partagé. Nous pouvons encore changer la donne. Le progrès et les mutations sociales n’attendront pas, il y a beaucoup d’impatients, le tout est de créer les conditions minimales pour un épanouissement gérable et durable.
A travers ce numéro de la revue, il est démontré que des projets ambitieux existent, mais ces derniers ne peuvent plus être le résultat d’opportunités aléatoires, ils doivent accompagner des dynamiques concertées et projetées avec des visions stratégiques bien posées.

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